La mort du transport aérien russe

Le COVID avait frappé tous les pays et hélas il en est maintenant de même des conséquences du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Les pays occidentaux n’ont pas pu s’opposer militairement à l’invasion de l’Ukraine, mais ils ont répliqué avec de sévères sanctions économiques et techniques. Celles-ci ont touché en premier lieu le transport aérien. Il est d’ailleurs curieux de constater que c’est le premier secteur économique impacté en cas de crise mondiale. Preuve peut-être de son utilité. La Russie a un besoin vital d’une desserte aéronautique fiable. Sa taille et la relativement faible infrastructure au sol ont conduit à la prépondérance d’un transport aérien fiable et bon marché. Pour ce faire, depuis la fin de l’URSS et l’éclatement des 1’200 appareils que possédait alors l’Aeroflot dans une multitude de compagnies aériennes, les transporteurs se sont tournés principalement vers les constructeurs occidentaux. A ce jour, les seuls appareils commerciaux produits en Russie à Irkoutsk sont les Superjet 100 dont la capacité est de l’ordre de 120 places. Mais un grand nombre de composants sont fournis par les sociétés occidentales. Autant dire que la construction aéronautique civile dépend entièrement des pays occidentaux. Voilà pourquoi les sanctions décidées par l’Union Européenne et les Etats Unis vont entrainer des conséquences gravissimes pour la Russie sans que de son côté les autorités du Kremlin puissent s’en défendre. Certes la fermeture des espaces aériens européens, américains et asiatiques (Japon et Corée) a eu pour contrepartie l’interdiction de survol de la Russie et en particulier de la Sibérie. Bien entendu, cela pénalise le trafic entre l’Asie et l’Europe et les compagnies aériennes sont amenées à faire un grand détour par le sud de la Russie ce qui rallonge le temps de vol de plusieurs heures pour les trajets vers le Japon, la Corée et la Chine. Des transporteurs comme Finnair sont particulièrement pénalisés. Mais dans l’ensemble les compagnies occidentales pourront largement supporter cette contrainte. Par contre les transporteurs russes se voient interdire tous leurs vols internationaux, à l’exception de certains pays asiatiques. Plus contraignant est l’embargo instauré par les constructeurs et les équipementiers vis-à-vis de la Russie. La grande majorité des flottes en opération dans ce pays provient d’Airbus ou de Boeing. Aeroflot opère 253 appareils dont 109 Airbus et 57 Boeings auxquels il faut rajouter 54 Superjets 100 dont on a vu la dépendance avec les équipementiers européens. S7 Airlines met en ligne 104 appareils dont 65 Airbus, 22 Boeing et 17 Embraer 170. Les 50 avions d’Ural Airlines sont tous des Airbus. Rossiya, de son côté a sa flotte pour moitié chez Airbus (26 avions) et pour moitié chez Boeing (28 avions). Enfin, Nordwind Airlines opère 11 Airbus et 21 Boeings. Autant dire que le transport domestique russe est entièrement dépendant du bon vouloir des pays occidentaux. Beaucoup de ces appareils sont loués par Aer Cap, Air Lease Corporation ou Avolon. Le risque est réel pour eux de devoir faire face à une nationalisation des flottes russes, ce qui les empêcherait de récupérer les avions qui restent leur propriété. Mais cela ne résoudra pas la continuité du transport intérieur car aucune pièce détachée ne sera plus livrée aux compagnies ce qui clouera inéluctablement et rapidement la majeure partie des avions au sol, même si les opérateurs n’hésiteront pas à canibaliser certains appareils pour remplacer les pièces défaillantes de ceux qu’il faudra garder en vol. Et n’est pas tout. Les systèmes de distribution électroniques sont pour la plupart occidentaux. Sabre a annoncé la déconnection de son service, Amadeus ne devrait pas tarder à en faire autant de même que Galileo. Comme toujours, les principales victimes du conflit en cours sont les populations des deux pays qui n’ont jamais rien demandé à personne. Quelle injustice ! Philippe MEYER (8) Philippe Meyer - YouTube

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